La Radiothérapie : grande oubliée de la Convention

Par Erik Monpetit, Président du Syndicat National des Radiothérapeutes Oncologues

Membre d’Avenir Spé

 

Même si la santé économique de nos cabinets libéraux de radiothérapie est bonne, la décote an-noncée des actes de RTE est une mauvaise solution pour aujourd’hui et encore plus pour demain.

Tout d’abord, rappelons quelques vérités sur notre tarification car dans les réunions de préparation du mouvement de grève dans les établissements de santé, certains relaient des contre-vérités.

1°) la RT n’a eu aucune revalorisation depuis 20 ans ;

2°) les chiffres actuels sont dus à la création d’actes qui n’existaient pas (IP, scanner de centrage entre autres) ;

3°) les techniques modernes de radiothérapie (consommatrices de ressources) n’apparaissent pas dans la nomenclature : couplage d’image scanner ou IRM ou pet-scanner, ré-irradiations complexes, stéréotaxie) ;

4°) Ils sont également issus du fait que les nouvelles techniques ont permis une augmenta-tion de dose (80 Gy pour une irradiation pour une tumeur de prostate par exemple versus 60 Gy), de l’augmentation de la durée de vie de nos patients avec possibilité de reprises de traitement, de situations métastatiques plus nombreuses et de techniques moins délétères qui permettent plusieurs séquences avec de meilleurs résultats et moins d’effets secon-daires (stéréotaxies des métastases par exemple) ;

5°) Ceci est tempéré depuis 2 à 3 ans par l’avènement des hypo-Fractionnements et la RT libérale ressent elle aussi comme les structures publiques un tassement des chiffres d’affaires.

Cela n’empêche pas la profession de faire évoluer son parc de machines en augmentant le nombre et la technicité, ainsi qu’en acquérant des logiciels de calcul de plus en plus précis. Les cabinets libéraux ont aussi beaucoup engagé de personnels dans toutes les corps de métier, notamment des physiciens et l’ensemble des fonctions support transversales (qualité, informatique, …) qui concourent à l’excellence des soins prodigués : le rapport d’observatoire annuel de l’INCA en est témoin).

Les nouvelles techniques (stéréotaxies, RCMI aujourd’hui, RT adaptatives demain) demandent plus de temps médecin et physicien, plus de logiciels de (contourage/calcul/vérification) et des accélé-rateurs de plus en plus complexes et onéreux.

Ainsi, l’ensemble de la RT française, libérale et publique et en accord avec les tutelles a engagé depuis 15 ans, un processus de forfaitisation avec une première étape et une réunion en automne 2018 qui validait la démarche. Après un ralentissement pendant la crise COVID, la dynamique de réforme de la cotation et de la forfaitisation a repris. Les tutelles ont demandé la participation au haut conseil de la nomenclature, et sa déclinaison en groupe technique de RT, regroupant des RT de toute origine. Les travaux ont vite avancé et le calendrier pour une application en janvier 2026, telle que demandée par le PLFSS de 2024, a toutes les chances d’aboutir.

Une décote arbitraire non concertée avec la profession, faisant fi des travaux en cours par des groupes experts, envoie un message incompréhensible et délétère envers les professionnels et experts engagés dans la démarche et risque de bloquer ce travail bien engagé.

En ce qui concerne l’utilisation de la CCAM actuelle, la plupart des centres de RT ont une utilisation modérée de la tarification, et le SNRO a toujours condamné les rares abus qui lui ont été signalés.

Depuis au moins 6 ans, le SNRO a toujours appelé à une utilisation raisonnée et modérée de la tari-fication, en le rappelant notamment lors de ses séminaires de printemps. Il participe activement aux travaux des tutelles et de l’INCA et n’a jamais eu d’autres exigences que la reconnaissance des actes réalisés.

Souvent les chiffres annoncés confondent chiffre d’affaires et bénéfice. On oublie souvent les coûts de fonctionnement et d’investissement, le développement de l’offre de soins, le maintien du niveau d’excellence, et le risque financier porté en propre par les cabinets libéraux.

L’idée de se servir sur la RT pour financer des augmentations justifiées de certains actes a été suggérée par le président de la FHP lors d’une réunion au ministère de la santé, en présence du ministre d’alors Mr Rousseau, sans rappeler l’engagement en cours et l’avancée sur le processus de forfaitisation.

À l’occasion du mouvement, qui avait été initié par les groupes de santé, entraînant dans leur sillage des spécialistes d’organe qui attendent depuis longtemps des revalorisations (que nous répétons justi-fiées) cette idée refait surface.

Le SNRO pense donc que cette solution si elle est engagée :

– 1°) va mettre en péril économique des cabinets en plein investissement, en période d’embauche ou en période d’intégration de nouveaux associés (du fait des nouvelles tech-niques)

– 2°) Instaurera un climat de défiance dans les discussions actuelles et on peut s’étonner du report de la réunion prévue le 23-05

– 3°) accélérera le processus de financiarisation des structures de RT libérale et bien qu’il tente de s’y opposer depuis de nombreuses années, il n’aura que peu d’arguments à donner à ses adhérents. Il en a averti les tutelles à chaque réunion du groupe technique RT à l’INCA et a même été reçu par la DGOS pour évoquer le danger avec perte de qualité, de sécurité de la RT mais aussi dérive financière…

– 4°) créera un précédent sans retour possible : cela incitera les tutelles et notamment la CNAM à renouveler cette stratégie de donner satisfaction aux uns en prenant aux autres, fa-vorisant les divisions et oppositions entre spécialités… et risque à terme d’affaiblir profon-dément le rôle et le poids de l’ensemble des représentants syndicaux.

Que des syndicats médicaux se prêtent à ce jeu est désolant, d’autant plus quand ils le font au détriment de leurs adhérents…

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