Par Dr Benoit FEGER, ORL à Angoulême
Président de l’URPS ML NA et Membre du bureau d’Avenir SPE le Bloc
Les nouvelles recommandations de la SFAR pour la Chirurgie ORL pédiatrique posent-elles un problème de santé publique ? Ces recommandations ont resserré les contraintes organisationnelles et logistiques pesant sur les établissements et celles de formation et d’activité minimales dédies aux activités de pédiatrie pour les médecins anesthésistes ( https://sfar.org/organisation-de-lanesthesie-pediatrique ).
Le Pr Vincent DARROUZET, Président du CNP d’ORL– CCF a rappelé l’importance en santé publique des gestes d’ORL pédiatrique « courants » d’adénoïdectomies, d’amygdalectomies, d’aérateurs trans tympaniques sur la santé des enfants ainsi que leur impact dans l’acquisition des apprentissages et donc de pertes de chances inacceptables en santé publique.
Ces recommandations commencent à entraîner un désengagement massif et accéléré de la réalisation de ces actes peu valorisés en T2A et honoraires, tant dans les cliniques privées, que dans les hôpitaux généraux. Les conditions de réalisation et économiques, le niveau de compétences et les conséquences sur les assurances en responsabilité professionnelle sont les motifs de ces désengagements.
Pour éclairer le débat : de quoi parlons-nous ? De quels volumes d’actes s’agit-il ?
Vous trouverez en annexes ci-dessous les données, issues du PMSI 2022, les actes volumes réalisés tant en structures privées que publiques. Les données du PMSI de 2022 montre le volume important d’actes de chirurgie ORL courante de 148 979 actes dont 93 535 (62.8 %) sont réalisés en privé et 55 444 (37.2%) en public.
De 0 à 14 ans, 105 066 actes d’adénoïdectomie, d’amygdalectomie, d’aérateur sont réalisés dont 67 909 (64.4%) en privé, 31 323 (30%) en public hors CHU et de 5834 (5.6%) en CHU:
La répartition selon les âges est :
- <2 ans : 12428 actes dont 7 464 (60.0 %) en privé, 3 664 (29.5%) en CH public et 1 300 (10,5% ) en CHU
- 2 -4 ans : 55691 actes dont 36 409(65.4 %) en privé, 1 6459 (29.5%) en CH et 2 832(5.1%) en CHU
- 5-9 ans : 32038 actes dont 20 994(65.5%) en privé, 9 595 (30%) en CH public et 1 449 (4.5%) en CHU
- 10-14 ans : 4909 actes dont 3 051(58 %) en privé, 1 605 (36%) en public et 253 (5%) en CHU
Un certain nombre d’actes sont réalisés dans les hôpitaux universitaires pour la formation, c’est loin d’être une activité importante.
Les conséquences de l’applications de ces recommandations d’anesthésie pédiatrique pour la chirurgie pédiatrique ORL courante réalisée actuellement sans une sinistralité importante dans les structures hospitalières de proximité tant libérales que publiques seraient donc importantes en volume, celui-ci devant être absorbé essentiellement par les CHU.
Cela posera des problèmes de disponibilité opératoires et de lits pour des CHU déjà sous tension.
D’autre part ces actes sont réalisés actuellement en ambulatoire. Un tel transfert vers les CHU ne permettra pas, compte-tenu des règles de distances et de proximité, une hospitalisation ambulatoire pour beaucoup de jeunes patients à moins d’un effort financier supplémentaire des parents pour un logement hospitalier péri opératoire à proximité du CHU.
Ces augmentations de contraintes temporelles de délais de prise en charge, de contraintes géographiques d’éloignement, telles que nous le présentons dans notre grande région de Nouvelle Aquitaine, ne seront pas sans conséquences dans un retard de prise en charge, d’un abandon de soins et donc de pertes de chance et de complications à l’âge adulte pour ces enfants.
Il convient donc de revoir avec une plus grande concertation ces recommandations pour à la fois assurer des bonnes conditions d’intervention et de prise en charge de proximité des besoins de soins en chirurgie ORL pédiatrique courante.