Pour la 1re fois, la majorité des RDV non urgents est fixée à moins d’un mois et 25 % le sont à moins de 13 jours
(Étude de l’institut CSA pour le SNOF – 2022), analyse par le Dr Joy Raynaud, géographe spécialiste de l’accès aux soins)
Communiqué de presse du 02/12/2022
Le Docteur Thierry Bour, Président du SNOF, dévoile ce matin les résultats de l’édition 2022 de l’étude CSA/SNOF sur les délais de RDV en ophtalmologie*. Cette enquête menée grâce à des appels mystères sur le terrain, mesure les délais selon 2 motifs de consultation pour un nouveau patient : 1/ lors d’une consultation périodique et 2/ en cas d’apparition de nouveaux symptômes nécessitant un examen rapproché (sans notion d’urgence), via une prise de RDV par téléphone. Le 1er motif a été également exploré par internet.
Cette année encore, l’enquête confirme que le délai médian pour obtenir un RDV a nettement diminué depuis 2019, passant de 43 à 28 jours (-15 jours). Ces résultats sont d’autant plus significatifs qu’ils s’inscrivent dans un contexte particulier marqué par le pic de départs à la retraite des ophtalmologistes et par une hausse des demandes de RDV suite à des retards de soins lors de la pandémie (notamment soins chirurgicaux).
Le Dr Thierry Bour déclare : « La baisse des délais constatée depuis 2019, et confirmée par d’autres enquêtes, intervient alors que les nouvelles mesures de primo-prescription par les orthoptistes ne sont pas encore en application. Face à ce constat, il faudra évaluer leurs effets dans les prochaines années sur l’offre de soins, avant d’en décider d’autres. C’est pourquoi nous félicitons les pouvoirs publics d’avoir légiféré dans le PLFSS en faveur d’un meilleur encadrement des téléconsultations afin d’éviter de retomber dans des travers mis en évidence dans certains centres de santé ophtalmiques. La priorité aujourd’hui est de définir les aides conventionnelles destinées à améliorer l’offre ophtalmologique dans les zones sous-dotées, notamment par la mise en place de sites secondaires dépendant de pôles d’ophtalmologie libérale et d’équipes de soins spécialisées.»
Une baisse continue et en accélération des délais de RDV depuis 2019
Le délai médian d’obtention par téléphone d’un RDV dans le cas d’un contrôle périodique continue de diminuer, passant de 43 à 30 jours au plan national, soit deux semaines de moins par rapport à l’étude SNOF – CSA réalisée en avril-mai 2019. La moitié des RDV sont donnés à moins d’un mois et 25 % sont obtenus en moins de 13 jours. La proportion des RDV obtenus pour un nouveau patient s’est elle aussi améliorée (+6 % depuis 2019).
Dans le cas d’apparition de symptômes (scénario 2), le délai médian est passé de 10 jours en 2019 à 5 jours en 2022, soit une baisse de 5 jours en 3 ans et de 3 jours en 1 an. A noter cependant que si les délais s’améliorent, la proportion de RDV obtenus sur ce scénario a diminué de 7 % depuis 2019. Une situation qui s’explique notamment par un rattrapage des interventions chirurgicales qui n’ont pas pu être réalisées lors de la pandémie, ce qui laisse moins de temps pour les consultations.
Par ailleurs, l’écart de délai entre les médecins de secteurs 1 et 2 s’est fortement réduit. Il est aujourd’hui de 4 jours contre 24 en 2019 (-20 jours) pour les RDV non-urgents et est identique dans les 2 secteurs pour le scénario semi-urgent (5 jours).
La prise de RDV via un site internet combinée à la réorganisation des cabinets en équipe pluridisciplinaire continue de porter ses fruits. En 3 ans, les délais se sont améliorés de plus de deux semaines (26 vs 42 jours) et la proportion de RDV obtenus a augmenté de +25 %. Consciente du potentiel de développement des RDV via un site internet, la filière visuelle fait aujourd’hui figure d’exemple : plus de 2 257 ophtalmologistes proposent ce service. Un atout qui participe à réduire les délais de RDV en ophtalmologie. 10 % des RDV sont donnés en deux jours et 25 % dans les 7 jours pour les demandes de soins non urgents.
L’étude révèle par ailleurs que depuis 2020, de moins en moins de patients sont renvoyés sur internet après un appel téléphonique : 9 % en 2022 vs 30 % en 2020. Une évolution positive qui montre une meilleure disponibilité des secrétaires médicaux et évite une fracture numérique pour certains patients âgés.
Une réalité partagée sur tout le territoire
La réduction des délais est une réalité dans 10 régions sur 13 par rapport à 2019 dans le cas d’un contrôle périodique : (-89 jours) en Normandie ; (-75 jours) en Bretagne, (-54 jours) en Centre-Val de Loire et (-34 jours) en Auvergne-Rhône-Alpes. Dans le cas du scénario 2, c’est 11 régions sur 13 qui ont vu leur délai se réduire : Normandie (-26 jours), Bourgogne Franche-Comté (-19 jours), Centre-Val de Loire (-13 jours) et Pays de la Loire (- 12 jours). Par internet, le constat est le même. Les délais dans les zones rurales et les unités urbaines continuent de s’améliorer quel que soit le scénario. En cas d’apparition de symptômes, les délais ont fortement diminué dans les communes rurales et urbaines de 20 000 habitants (délais de RDV de seulement 2 jours). Une situation encourageante en vue du règlement des délais en zones sous-denses.
Le SNOF dévoile également les délais de RDV téléphoniques dans les dix plus grandes villes de France. Montpellier, Lyon et Nantes observent par exemple des délais raccourcis de plus d’un mois et Nice et Lille, de près de 3 semaines (scénario 1). Dans le cas du scénario 2, Toulouse fait figure d’exemple avec une forte amélioration (-51 jours). En revanche, l’étude révèle que depuis 2019, les délais de RDV sur l’agglomération parisienne n’ont pas évolué, ce qui semble remettre en cause l’effet positif de l’ouverture de nombreux centres de santé ophtalmiques pour améliorer l’accès aux soins.
Le docteur Thierry Bour ajoute : « La baisse drastique du nombre d’ophtalmologistes prévue par la DREES et pouvant conduire à un effondrement de l’offre de soins oculaires, n’a pas eu lieu. Les ophtalmologistes ont su faire preuve d’adaptation pour stabiliser l’offre de soins oculaires sur l’ensemble du territoire tout en améliorant les délais de RDV et ce malgré un contexte soutenu de départs à la retraite des ophtalmologistes. La suppression, votée dans le PLFSS, des cotisations pour le cumul-emploi retraite devrait contribuer à maintenir des médecins en activité dans les années à venir. »
Objectif 15 jours de délai médian pour obtenir un RDV d’ici 2-3 ans
Depuis 2017, les délais de RDV en ophtalmologie ont baissé de 50 % en moyenne grâce aux efforts réalisés au sein de la filière. Afin de poursuivre cette dynamique et aller plus loin dans l’objectif d’assurer un accès fluide des patients aux soins oculaires sur l’ensemble des territoires, le SNOF dévoile plusieurs propositions. L’objectif est d’atteindre 80 % de réduction des délais médians de RDV, soit 15 jours pour le scénario 1 et 3 jours pour le scénario 2.
Des objectifs ambitieux mais atteignables d’ici 2-3 ans au plan national et dans les 5 ans pour les zones sous-dotées en ophtalmologistes grâce aux 8 mesures proposées par le SNOF :
1. Evaluer l’impact de la mise en place de la primo-prescription pour les orthoptistes des lunettes et lentilles de contact pour les patients âgés de 16 à 42 ans pour les faibles amétropies. Elle devrait aussi contribuer à la baisse des délais de RDV d’autant que près de 500 orthoptistes seront validés par an dans les prochaines années. La mesure entre en application en cette fin 2022. Cela nécessitera probablement 2-3 années de recul.
2. Tenir compte du développement des protocoles organisationnels et des protocoles de coopération sans présence de l’ophtalmologiste, mais avec analyse du dossier par lui-même (RNO, OPG&GO, RNM, glaucome).
3. Une télémédecine (téléconsultation + télé-expertise) éthique dans des lieux médicaux ou neutres, ainsi que le renouvellement des équipements optiques par les orthoptistes pourront également avoir un impact sur les délais de RDV, notamment pour les demandes de soins rapprochés. Une alternance avec des consultations médicales présentielles reste indispensable.
4. Améliorer la démographie des ophtalmologistes, comme cela est conseillé par le rapport IGAS-IGAESR, pour assurer la couverture territoriale et le renouvellement des générations – alors que la France est désormais sous la moyenne européenne.
a. Au moins 200 postes d’internes par an dans les 10 prochaines années
b. Développer les stages d’internes en libéral (phases 2 et 3)
c. Augmenter la densité dans les régions déficitaires (en-dessous de 8 oph/100 000 hab.).
5. Poursuivre le développement de l’équipe de soins autour de l’ophtalmologiste. Le travail aidé garde un potentiel important de développement et il est le garant du maintien d’un dépistage effectif et de qualité des pathologies oculaires, très souvent silencieuses initialement.
6. Développer les cabinets secondaires pour un meilleur maillage territorial, avec une présence au moins à temps partiel d’ophtalmologistes, en y associant la télémédecine et les orthoptistes (protocoles organisationnels à distance). Utiliser le nouveau zonage des ARS pour débloquer des aides à l’installation de nouveaux cabinets en zones sous-dotées. Ces sites secondaires trouveront une plage privilégiée au sein des pôles d’ophtalmologie libérale et des équipes de soins spécialisées (2 ont été créées récemment en ophtalmologie).
7. Renforcer l’ouverture de plages de RDV à délais courts notamment grâce aux logiciels en ligne et à l’adhésion au service d’accès aux soins (SAS).
8. Améliorer le renouvellement des équipements optiques chez l’opticien, sous condition d’un vrai échange d’information en retour, notamment au travers d’outils numériques comme l’e-prescription et la messagerie sécurisée.
La présentation est disponible en cliquant ici
*Méthodologie de l’enquête
Enquête par téléphone
Enquête réalisée en septembre 2022, en France métropolitaine, pour la quatrième année consécutive par l’institut CSA Research, auprès d’un échantillon représentatif de 2610 médecins ophtalmologistes pour l’enquête téléphonique et de 2029 pages de RDV en ligne nominatives
Création de deux scénarios avec un délai de prise en charge différent :
– Scénario 1 : Nouveau patient demandant un RDV pour un contrôle périodique de la vue (n = 1 300)
– Scénario 2 : Nouveau patient présentant de nouveaux symptômes (points noirs, filaments) nécessitant une consultation rapprochée, sans être une véritable urgence (n = 1 310)
Enquête en ligne
Pour la quatrième année consécutive, l’institut CSA a testé la possibilité de prendre des RDV en ligne pour 4 145 ophtalmologistes du listing.
Recherche de RDV sans critère d’urgence :
– Sélection rubrique « nouveau patient » ou « consultation d’ophtalmologie ».
La recherche s’est effectuée sur un moteur de recherche en indiquant le nom et l’adresse du médecin.
Parmi les sites de RDV en ligne (2029 explorés), Doctolib était le plus fréquent et en second Alaxione.
Les résultats ont été analysés par Mme Joy Raynaud, docteur en géographie.