Tribune FNMR :  » À force d’économies, c’est l’accès aux soins qu’on fragilise  »

OPINION. « À force d’économies, c’est l’accès aux soins qu’on fragilise »,

par Jean-Philippe Masson, Xavier Bertrand et Florence Lassarade

 

Alors que l’Assurance maladie prévoit de nouvelles baisses de tarifs pour plusieurs spécialités
médicales, Jean-Philippe Masson, Xavier Bertrand et Florence Lassarade alertent sur les
conséquences d’une politique d’économies à court terme. Selon eux, ces coupes fragilisent des
disciplines essentielles et aggravent les inégalités d’accès aux soins.

Par Jean-Philippe Masson (président de la Fédération nationale des médecins radiologues), Xavier Bertrand (président LR des
Hauts-de-France) et Florence Lassarade (sénatrice LR de la Gironde)

 

Trois semaines pour une IRM, des dizaines de kilomètres pour une séance de radiothérapie , quatre à six mois pour consulter un néphrologue avec une perte de chance à la clé, refus d’une analyse urgente un après-midi, trois ans pour une procréation médicalement assistée. Ces situations sont la réalité de nombreux patients en France. Elles traduisent un accès aux  soins de plus en plus difficile  marqué par des délais insoutenables, des distances absurdes et des renoncements contraints.

 

Dans ce contexte déjà tendu, l’ Assurance maladie entend réduire, encore, les moyens alloués à certaines spécialités. Dans un rapport publié en juillet dernier, six disciplines sont ciblées : la biologie médicale, la radiologie, la médecine nucléaire, la radiothérapie, l’anatomie pathologique et la néphrologie.
Six fantastiques piliers souvent invisibles mais indispensables sont présents à chaque étape du parcours de soins, en particulier pour les maladies graves. Catherine Vautrin, alors ministre de la Santé, confirmait cette orientation dans les colonnes du Monde, le 26 juillet, évoquant des
« situations de rente » et la nécessité de « baisses de tarifs ». Éléments désormais repris noir sur blanc dans le projet de budget de la Sécurité sociale.

Politique de facilité, dégâts réels

Les spécialités visées ne sont pas de simples lignes budgétaires : derrière elles se cachent des équipements lourds, des astreintes permanentes, une exigence d’innovation continue et des besoins croissants pour une population vieillissante ; des métiers à haute responsabilité qui posent des diagnostics, adaptent un traitement, suivent une dialyse, caractérisent un cancer, accompagnent un patient atteint de maladie chronique.

Réduire leurs moyens, c’est choisir les délais supplémentaires, les pertes de chance et l’accentuation de la fracture territoriale. Chaque semaine gagnée dans un traitement de cancer augmente les chances de survie : que se passe-t-il si l’examen attendu prend des mois ? La tentation est grande de chercher des économies là où la contestation est moins audible et la technicité du sujet masque les conséquences humaines, plutôt que de mener une réflexion structurelle : comment mieux organiser les parcours de soins, renforcer l’attractivité des zones sous-dotées, adapter la gouvernance hospitalière aux besoins réels des patients ?   Autant de questions laissées sans réponse par des arbitrages qui font peser l’effort sur les soignants et, in fine, sur les patients.

Patients, élus, professionnels : tous perdants

Pour les patients, la logique est implacable : moins d’équipements, c’est moins de
professionnels, plus d’attente et moins de chances de guérison. Pour les élus locaux confrontés à la désertification médicale, l’équation est impossible : maintenir une offre de soins de qualité sur leur territoire quand les moyens baissent. Pour les soignants, c’est la double peine : travailler sous pression, avec des outils vieillissants, tout en assumant une responsabilité vitale.

Pour une vraie politique de santé

Il existe pourtant des solutions. Les comparaisons internationales montrent qu’un système de santé performant repose moins sur des coupes budgétaires ponctuelles que sur une vision à long terme : investir dans la prévention pour réduire la pression sur les filières lourdes ; renforcer l’organisation territoriale avec des pôles régionaux capables de mutualiser les équipements ; garantir des budgets pluriannuels stables aux disciplines stratégiques ; associer les professionnels à la gouvernance pour éviter des décisions déconnectées de la réalité. On ne peut pas et vanter un système de santé universel et solidaire et fragiliser ses piliers silenceux 

C’est plus qu’un arbitrage budgétaire, c’est un choix de société : soit nous donnons à chacun, où qu’il habite, les moyens et infrastructures lui permettant d’être soigné vite et bien, soit nous assumons une médecine à deux vitesses où certains patienteront, se déplaceront, voire renonceront.

La question est posée : quelle médecine voulons-nous vraiment ?

 

Signataires  
Jean-Philippe Masson, Président de la Fédération nationale des médecins radiologuesXavier

Bertrand, président (LR) de la Région Hauts-de-France

Florence Lassarade, sénatrice (LR) de la Gironde et présidente du groupe d’études sur le cancer

du Sénat.

 

Cosignataires  
Olivier Allice, Président Communauté Radiologique de FIT – France Imageries Territoires Lionel Barrand, Président du SNJBM – Syndicat des Biologistes Médicaux

Sophie Bauer, Présidente du SML – Syndicat des Médecins Libéraux Xavier Bertrand, Président de la Région Hauts-de-France

Charles-Henry Beglin, Président de SIMAGO – Réseau de Centres d’Imagerie d’Exercice Libéral Alexandra Blachère, Présidente de l’Association PPP – Porteuses de Prothèses Mammaires PIP François Blanchecotte, Président du SDB – Syndicat des Biologistes

Anna Boctor, Présidente du Syndicat Jeunes Médecins

Frédéric Breittmayer, Président d’IMDEV – Groupement d’Imagerie Médicale

Philippe Camparo, Président du SMPF – Syndicat des Médecins Pathologistes Français Pierre-Fleury Chaillot, Directeur Médical du Groupe IMADIS – Téléimagerie

Jérôme Chetritt, Vice-Président du SMPF – Syndicat des Médecins Pathologistes Français Josiane Corneloup, Députée de la 2ème circonscription de Saône-et-Loire, Secrétaire de la Commission des affaires sociales

Alain Dana, Président de l’URLEM – Union de la Radiologie Libérale en Mouvement Franck Devulder, Président de la CSMF – Confédération des Syndicats Médicaux Français

Georges-Philippe Fontaine, Président du SNMN – Syndicat National des Médecins Nucléaires

Patrick Gasser, Président d’Avenir Spé – Syndicat des Médecins Spécialistes Lamine Gharbi, Président de la FHP – Fédération de l’Hospitalisation Privée Christophe Goupy, Président de NEPHROLIB

Alain Guillemot, Président du VIDI – Réseau de Radiologues et Radiothérapeutes Indépendants Bernard Huynh, Président de la FMF Spé – Fédération des Médecins Spécialistes de France Charles Journé, Vice-Président du Groupe IMADIS – Téléimagerie

Sonia de La Provôté, Sénatrice du Calvados, Membre du groupe d’études Cancer

Florence Lassarade, Sénatrice de la Gironde, Présidente du groupe d’études Cancer

Patricia Lefebure, Présidente de la FMF – Fédération des Médecins de France Jean-Christophe Lecomte, 1er Vice-Président du Syndicat Jeunes Médecins Xavier Lemoine, Président de FIT – France Imageries Territoires

Fabrice Lorchel, Président du SNRO – Syndicat National des Radiothérapeutes Oncologues Michel Lauzzana, Député de la 1ère circonscription du Lot-et-Garonne, Président du Groupe d’études Cancer

Jean-Philippe Masson, Président de la FNMR

Aymeric Rouchaud, Co-fondateur du CORAIL – Collectif pour une Radiologie Indépendante et Libre

Paul-Gydeon Ritvo, Co-fondateur du CORAIL – Collectif pour une Radiologie Indépendante et Libre

Vivien Thomson, Président du Groupe IMADIS – Téléimagerie

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